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MutElles, le réseau des femmes en mutualité a 5 ans !

Article - MutElles

Le chemin vers la parité en mutualité est encore long mais, grâce au travail de MutElles et à ces militants, la cause avance. Doucement mais sûrement ! Le cinquième anniversaire de ce réseau de femmes est l’occasion de faire le bilan sur le chemin parcouru et celui qui reste à parcourir. Rencontre avec Dominique Joseph, secrétaire générale de la Mutualité Française et présidente de MutElles.

Interview réalisée en mai 2021

Pourquoi avoir créé MutElles ?

En juillet 2015 est parue une ordonnance qui fixe, pour les mutuelles et fédérations de mutuelles, un objectif d’égale représentation des femmes et des hommes dans les conseils d’administration. On parlait alors de compter 40 % de femmes à l’horizon 2021, ce qui n’est pas une parité exacte. Début 2016, j’ai donc fait le point sur la situation, avec l’observatoire de la parité mis en place dans les années 2000, pour savoir où en était la fédération par rapport à cet objectif. La représentation des femmes était de 23 %. Nous n’étions pas au rendez-vous. J’ai ensuite souhaité mesurer à quel rythme nous progressions, et nous n’étions passé que de 21 à 23 % en 15 ans ! Ça a été un déclic. À ce même rythme de progression, il nous faudrait 130 ans pour atteindre cette parité.

Je me suis alors interrogée sur les outils qui ont été précédemment utilisés par d’autres organisations pour traiter cette question de la parité, de la mixité et de la diversité pour faire changer la donne. Les réseaux féminins étaient vraiment le bon vecteur pour engendrer une prise de conscience pour l’intégration dans les stratégies mais aussi pour favoriser l’expression, la prise de parole. Ce qui nous inquiétait c’était que la réponse à la question que l’on posait était uniforme : « Nous voulons bien des femmes mais nous n’en trouvons pas. » Il fallait que l’on comprenne : Pourquoi est-ce le cas ? Cherchons-nous vraiment ? Les femmes sont-elles assez visibles et repérables ? Comment les inciter à postuler sur des postes de déléguée, d’administratrice, voire plus ? C’est ainsi qu’il nous est apparu évident de créer ce réseau de femmes en mutualité.

Quels sont les objectifs de MutElles ?

Nous avons plusieurs objectifs : la mixité, jouer un rôle sociétal de prise en compte des femmes dans le système de santé, et plus généralement dans la société, et enfin, permettre à la Mutualité Française d’avoir valeur d’exemplarité dans l’égalité femmes-hommes et le progrès social, en incarnant ces valeurs à travers une meilleure représentation des femmes. C’est un véritable enjeu démocratique. Ce réseau, qui n’est pas une association et n’a pas de forme juridique définie, a pour avantage de mettre les femmes en confiance, de libérer la parole et de leur retirer de la tête qu’elles ne sont pas capables, pas assez compétentes pour postuler à des postes importants. Certaines femmes qui ont accédé à ces postes et font partie de MutElles, s’engagent pour déconstruire ces stéréotypes et inciter d’autres femmes à oser. OSER, C’est le maitre mot de MutElles.

Quel est le rôle d’un militant du réseau ?

Toute femme, et depuis deux ans tout homme, peut rejoindre MutElles. Il n’y a pas de cotisation, juste une charte à faire vivre. Il s’agit ensuite, pour ceux qui le souhaitent et le peuvent, d’en faire la promotion dans son milieu professionnel et opérationnel pour les salariés, et dans les différentes instances pour les militants et les élus. Tout adhérent peut mettre en avant le réseau comme il le souhaite via des supports, l’organisation de petits déjeuners sur la parité, des « afterwork » pour informer, échanger sur les ambitions, les objectifs et les faire intégrer dans la stratégie de son groupement. Chacun est un maillon pour faire ruisseler cet engagement et en faire une normalité. La parité ne doit plus être une exception.

5 ans après, comment a avancé la cause ?

En moyenne nous n’avons pas atteint les objectifs. Nous en sommes à 29 %, ce qui représente un gain de 6 points en 5 ans. On peut dire que nous en sommes loin. Je sais pertinemment que ces résultats cachent de grands écarts. Certains groupements sont bien au-delà et ont atteint les 40 % dans les 2/3 ans de la création de MutElles. Et pour d’autres, je ne suis même pas sûre qu’aujourd’hui il y a une seule femme dans leurs comités d’administration. Il y a une réalité que je porte auprès de la secrétaire d’état à l’ESS, Olivia Grégoire : quand on a des mutuelles qui ne couvrent que des retraités, sur un secteur de métier plutôt masculin, avec une moyenne d’âge d’élus élevée et pas de renouvellement de militants, je trouve illusoire d’exiger de ce groupement qu’il atteigne les 40 % minimum de femmes, surtout dans ce délai.

Quelle est la suite ?

MutElles va continuer de se mobiliser pour accompagner au mieux les groupements dans les années qui viennent, pour qu’ils y arrivent. Ma crainte, qui commence à devenir réalité, c’est qu’au niveau des pouvoirs publics des dispositions plus contraignantes soient prises, voire des sanctions. Et je voudrais éviter cela car ce serait pour moi un véritable échec. Atteindre les objectifs sous la contrainte ce n’est pas le signe d’un mouvement moderne, d’un écho de la société. Cela doit être naturel. Cette approche négative des quotas poserait la question de la juste place : « Suis-je là parce que j’ai des convictions, parce que je suis tout aussi compétente qu’un homme ou bien parce que je suis une femme ? ». C’est long et difficile de faire intégrer la parité dans la stratégie de tous les groupements mais il faut du temps pour que les graines germent.

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